Samedi 26 Août 2017 – Jour 2 à Rock En Seine 2017 – Après une journée du vendredi marquée par le concert fou de Franz Ferdinand et les prestations réussies de Barbagallo, Gunwood et The Pharcyde, nous attendions beaucoup de cette 2e journée à Rock En Seine !
Lysistrata fait chauffer les grattes
Ces trois jeunots d’à peine 20 ans arrivant tout droit de Saintes lancent la journée sur du post-hardcore. D’emblée hyper bruyant et puissant, Lysistrata nous régalent entre distorsion, cris et riffs saccadés et violents.
Bien qu’ils soient encore très jeunes et qu’ils aient des looks d’écoliers plus ou moins rebelles, les trois musiciens semblent dans leur élément sur scène. Le batteur introduit les différents morceaux en s’adressant au public, le bassiste balance un bon nombre de air kicks en errant sur la scène alors que le guitariste semble possédé par la musique qu’il joue dans un style très punk. Nous avons un petit faible pour les parties instrumentales de morceaux que l’on pourrait rapprocher du math rock de Mutiny On The Bounty.
Ce trio représente peut-être l’avenir du rock français, et en tout cas c’est tout ce qu’on leur souhaite ! Leur premier album, The Thread, sortira dans moins de deux mois. En attendant, si “vous voulez une chanson d’amour, [qui] parle un peu de haine aussi, [qui] est une chanson douce” (pour reprendre les mots du batteur), voici Asylum ! Pour la chanson douce, on repassera…
Jain emporte la foule de Rock En Seine
Découverte au Sziget en 2016, Jain fut un très gros coup de cœur en live pour nous à Indeflagration. Nous n’avons donc pas résisté à l’envie de retourner la voir cette année à Rock en Seine.
La critique ne peut être qu’élogieuse tant la jeune chanteuse illumine la scène entière par sa présence. Elle semble sincèrement heureuse d’être ici. Considérant son public comme partie intégrante de son spectacle, elle le regarde, le fait participer en enregistrant les voix de parfaits inconnus sur son tube Come, en « s’offrant » à lui dans une bulle géante et en se laissant « emporter par la foule ».
Nous faisons le test de marcher à contre sens du public pour observer les visages des gens venus écouter l’artiste. Tous arborent un grand sourire et des yeux pétillants de joie. Ils ont l’air de passer réellement, sincèrement, un bon moment. Aucun applaudissement ni danse ne sont calculés, la communion entre la Jain et son public de fans est parfaite.
Elle présente une chanson d’amour Paris adressée à la ville lumière et écrite en 2015 quelques semaines après les attentats du Bataclan. Cette ode au rassemblement et à l’amour – rien que ça ! – achève d’unir le public de Rock En Seine conquis.
L’énergie groovy et synthétique de Little Dragon
Quelques heures après les avoir interviewés, nous retrouvons les quatre Suédois de Little Dragon sur la Scène Cascade. Les trois hommes se sont vêtus de tenues blanches plus ou moins disco-style. Quant à la belle Yukimi Nagano, déambulant sur scène tambourin à la main, elle arbore un style surréaliste avec une ample robe jaune fluo ainsi qu’un disque de la même couleur autour de la tête. La foule est assez éparse, et c’est bien dommage.
| Voir aussi : notre interview exclusive totalement déjantée avec Little Dragon à Rock en Seine 2017
Le public se laisse aller sur le planant High alors que le synthétiseur et les percussions de Strobe Light – dont la version live est allongée d’une longue partie instrumentale et dure près de 10 minutes – déclenchent des danses mystiques.
L’intrigante Yukimi Nagano nous apprend que Ritual Union ne s’adresse pas aux personnes en couple “Paris, any lovers out there tonight? This song is not for you!” et nous confie aussi qu’elle s’est réveillée ce matin malade, avec de la fièvre, mais que le public lui a donné l’énergie nécessaire pour faire le show.
Ce concert d’électro pop suédoise à l’univers sci-fi plutôt barré s’achève en beauté avec Klapp Klapp. Cette ambiance de night club des Nineties nous a plus que plu.
La bonne recette The Jacques
Encore un très jeune groupe, mais il nous vient cette fois-ci de Bristol et nous rappelle d’ailleurs leurs aînés de The Libertines. Les bons ingrédients sont là : guitare au son pur à la britannique, batterie légère mais agressive, voix rauque et désenchantée, clavier et basse pour donner du relief.
Il y a encore beaucoup de naïveté dans la musique et le jeu de The Jacques, mais c’est très agréable à écouter jusqu’au moment où les insupportables problèmes de larsen de la Scène Firestone nous forcent à fuir. Nous plaignons les musiciens impuissants face au manque de réactivité des équipes de son.
Vos tympans souffrent toujours de l’effet Larsen, The Jacques ont ce qu’il vous faut avec Painkiller.
Le rap californien de Vince Staples
Pour écouter le rappeur californien Vince Staples, nous nous joignons à un public plutôt jeune venu bouger sur des lourdes basses trap et des sons dansants. Le jeune rappeur fait le show, seul sur scène, micro à la main. Il enchaîne les titres en faisant sauter le public avec notamment Party People.
Certains passages sont cependant plus phasants, notamment avec le morceau 745 sur lequel la foule se laisse aller. La piste audio enregistrée nuit quelque peu à la spontanéité et au naturel de la performance de Vince Staples dont l’enchaînement devient rapidement mécanique. Cela reste néanmoins une belle découverte.
La déception Fakear
Si nous aimons beaucoup ce que fait le jeune maître français de l’électro Fakear, nous devons avouer avoir été assez peu transportés par son concert. Nous nous interrogeons sur l’apport des musiciens – dont une harpiste – qui l’accompagnent sur scène.
La musique tribale et planante de Fakear nous ramollit jusqu’à nous assoupir. Nous nous réveillons sur La Lune Rousse, quand l’artiste nous demande de chanter, mais nous avons beaucoup de mal à trouver comment satisfaire sa requête. Il y un manque réel, selon nous, de connexion avec le public. Les titres n’ont pas été repensés suffisamment, et réajustés à un contexte festivalier.
Sleaford Mods ou l’anarchie stupéfiante
Nous abandonnons le grand Fakear pour partir à la rencontre de Sleaford Mods, un groupe post-punk britannique tout droit descendu de la paisible ville de Nottingham. Mais ce qui allait suivre n’avait rien de paisible du tout, bien au contraire.
Arrivés à la scène du Bosquet, c’est l’anarchie généralisée. Un duo d’énergumènes mi-homme mi-robot est en train de mettre le feu à la scène. Nous sommes perturbés, un peu mal à l’aise, mais fascinés par ce qui est en train de se passer. La scène est-elle bien réelle ou sommes-nous les cobayes d’une expérience psychotique et surnaturelle grandeur nature ?
Le chanteur, qui n’est clairement pas dans son état normal (s’il lui arrive de l’être), gesticule dans tous les sens et accumule les tocs. Le dos courbé, il se balance d’avant en arrière en continu et répète en boucle certaines gestuelles étranges avec sa main gauche tantôt placée derrière sa nuque, tantôt derrière son dos. Le tout en criant de toute ses forces et en inondant la scène de sa sueur elle, bien réelle. La scène est parfaitement flippante.
Son acolyte, le responsable DJ du groupe, reste lui bloqué sur une bande démo. Un balancement d’avant en arrière, une main dans la poche et l’autre sur un micro soigneusement disposée devant une zone sensible et centrale que nous ne nommerons pas. Folie mise à part, ces deux phénomènes ne laissent personne indifférent et la proposition artistique n’est pas inintéressante.
Certains titres marquent même nos esprits, parmi eux Jolly Fucker ou TCR sur lesquels Jason Williamson, chanteur du groupe, nous prouve qu’il a du flow et, qu’aussi perché qu’il puisse être, il est inspiré et inspirant. Après 20 minutes d’écoute et de contemplation, nous quittons les illuminés. Nous partirons à la recherche d’autres étincelles dans les allées sombres et imprévisibles de Rock En Seine dimanche.