Broken Homeland de Valparaiso | Dans l’univers rock, la tentative a toujours été grande de rassembler de grandes figures pour réaliser l’album modèle, celui qui dénote parce que rassembleur de talents. Mais au-delà des promesses, combien de projets avortés, de réelles déceptions car trop souvent dénués d’âme et de sens ? C’est ainsi, un corps constitué de plusieurs membres, mais encore faut-il que chaque membre ait sa propre identité et que le grand tout soit au diapason.
Qui sont Valparaiso ?
Valparaiso reprend cette tentation de tentatives bien risquée. Des cendres de Jack The Ripper en 2008, avec Hervé Mazurel, Thierry Mazurel et Adrien Rodriguez, naît une première rencontre connue sous le nom de Fitzcarraldo Sessions. Et une décennie plus tard, on retrouve nos musiciens parisiens avec ce nouveau collectif Valparaiso.
Une pléiade de noms et pas des moindres répondent à l’appel, et la liste a de quoi donner le tournis : Phoebe Killdeer (Nouvelle Vague), Dominique A, Rosemary Standley (Moriarty), Julia Lanoe (Mansfield Tya), Shannon Wright, Howe Gelb (Giant Sand), Josh Haden (Spain), Marc Huyghens (Vénus), Christine Ott et John Parish comme producteur. Respect déjà pour la setlist !
Une rencontre du destin
Et donc pour tordre le cou aux idées reçues sur la probable déception du grand chantier, disons d’emblée que l’alchimie fonctionne merveilleusement bien. Dès la première écoute, on se sent en phase avec l’ambitieux projet. Bien sûr les voix nous sont familières, et en même temps, il nous faut changer les étiquettes que nous collons habituellement sur ces artistes.
C’est l’œuvre de John Parish et son génial sens de l’orchestration. Il a créé un univers cohérent où chacun apporte sa griffe. Phoebbe Killdeer y dépose sa voix caressante et envoutante, Dominique A toujours à la frontière de l’androgynie, Julia Lanoe au timbre vocal lancinant, Marc Huyghens impose sa voix habitée, et Josh Haden surfe toujours entre apesanteur et rêverie… Le magicien Parish a su tirer le meilleur de chacun pour, au final, créer un ensemble solide et cohérent.
Broken Homeland, comme une invitation au voyage
Treize ballades naviguant habilement entre rythmiques rock sombres et douce poésie folk. Chacun s’est approprié le projet du collectif parisien et a su poser ses mots sur la mélodie. On reçoit cela comme une belle invitation au voyage, presque une BO de road-movie pour aventuriers rêvant de grands espaces. Au milieu des treize ballades, Parish le magicien, accompagné de la talentueuse Christine Ott, livre une perle instrumentale en piste 7, une page non écrite, peut-être une invitation à se saisir de cet instant pour imaginer d’autres voix.
Cette plage devient ici un beau point d’équilibre, un temps suspendu où le paysage est justement à construire… Mais Valparaiso ne s’arrête pas à cette aventure musicale. Les trois comparses de feu Jack The Ripper ont convié Richard Dumas et Amaury Voslion pour clipper trois morceaux avec élégance et grâce.
River Tides, Marées Hautes et Fire Place : 3 clips pour 3 morceaux inoubliables
On est tout de suite séduit par l’esthétique caravagesque qui émane de ces images en noir en blanc avec une volonté évidente de soigner le clair-obscur. Le peintre italien du 17ème y aurait retrouvé avec curiosité son sens de l’esthétisme et son réalisme troublant. Les deux titres phares, River Tides et Marées Hautes, reprennent carrément les mêmes codes esthétiques et le même personnage principal mais pour deux lectures bien différentes. Et Fire Place avec la troublante Rosemary Standley, en spoken-word, reprend aussi les mêmes codes du clair obscur.
Cet album de Valparaiso restera pour beaucoup comme un bel objet, soigné et abouti que l’on gardera à portée de main comme un album de famille renfermant de vieilles connaissances
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