Bonjour Hayley ! Pour commencer, comment est né The Jezabels ?
Heither, la claviériste du groupe, et moi-même on se connait depuis qu’on a 7 ans. On était à l’école primaire ensemble, puis au collège. On ne faisait à ce moment là que de l’acoustique. On vivait à Baird Bay, une grande ville Australienne. Puis on a bougé vers Sydney pour nos études et on a créé notre premier groupe avec les mecs [sic] : Sam et Nick. À notre premier concours de musique à l’université on est arrivé en 2ème position ! On ne pensait pas du tout y arriver donc c’était plutôt pas mal ! [rires]
À partir de là, nous avons commencé à faire quelques scènes, à écrire nos morceaux, puis à faire des tournées … Les choses se sont faites progressivement.
Tu composes tous les morceaux ?
On compose tous ensemble. C’est plutôt moi qui écris les textes et propose des mélodies, mais ça dépend vraiment… Parfois les paroles viennent en premier, parfois la musique, ça change constamment ! [rires] C’est en tout cas un travail vraiment collaboratif.
Dans votre nouvel album, on peut entendre plus de sons électroniques. D’où vous viennent ces inspirations ?
C’est assez inconscient. Ça vient surtout du fait que Heather aime acheter constamment de nouveaux instruments. Quand on a commencé, elle avait juste un vieux piano Yamaha un peu pourri qu’elle avait reçu quand elle était gosse, et puis au fil du temps elle a pu acheter du nouveau matos. En général elle joue des notes en l’air et parfois, d’un seul coup on va lâcher un : « Ouais ça sonne bien ça ! Faisons-en une chanson ! ». Les changements viennent vraiment d’elle. Et puis peut-être un peu du fait qu’on écoute certainement plus de musique électro qu’avant …
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Dirais-tu que votre style a évolué entre votre premier et votre dernier album ?
Je pense qu’on est assez influencés par la musique des eighties comme le new wave ou la musique gothique … Ça nous conduit forcément à synthétiser. Ah et puis la musique pop aussi ! Mais je pense vraiment pas que ces changements se font de manière consciente. Parfois on se lance dans un élan plus rock and roll, parfois plus électro, mais ça n’est pas vraiment un choix. Ça arrive comme ça, tout simplement ! [rires]
Nous avons clairement changé, je crois que c’est impossible de ne pas évoluer !
Où avez-vous déjà joué en France ?
On a joué quelques fois à Paris. Et on a failli jouer à Lille, on était en première partie des Depeche Mode et on était censé jouer mais les concerts avaient été annulés parce que les salles n’étaient pas chauffées.
Tu te vois où, dans environ 10 ans ?
J’aimerais continuer de chanter et de jouer de la musique… C’est très simple comme projet, mais à notre époque beaucoup de jeunes sont paralysés à l’idée de devoir faire des choix. Je connais beaucoup d’amis qui ne savent pas ce qu’ils veulent faire ou qui passent leur temps à changer de job. Moi je veux juste être chanteuse, c’est tout ce qui m’importe, et je pense que, pour ça, j’ai beaucoup de chance !
Es-tu née dans un environnement musical ou est-ce venu plus tard dans ta vie ?
Ça a toujours été là ! Mon père était musicien et ma mère jouait du piano. On écoutait beaucoup de rock à la maison. Il y avait toujours une guitare quelque part qui trainait. Et puis je chantais tout le temps sous la douche. [rires]
J’ai commencé assez tôt à écrire quelques textes…. Non, ce n’était définitivement pas un choix que j’ai du faire, c’était là, depuis toujours !
As-tu un morceau préféré de The Jezabels ?
Le nouveau single : Pleasure Drive. Je pense qu’il est très différent de toutes nos autres chansons. C’est ma chanson préférée parce qu’elle représente une belle période de ma vie et de celle du groupe. Elle parle de l’importance de « vivre le moment présent ». Elle est très romantique et assez abstraite mais je pense que cette chanson parle surtout de l’importance de profiter de la vie. Je me suis sentie très libérée et libre en l’écrivant !
Dirais-tu que tu es une personne optimiste ?
Oui ! Je n’en ai pas toujours été une, mais je pense que le fait d’avoir écrit cette chanson signifie bien que j’en suis devenu une !
Si l’on regarde les titres de plusieurs des chansons de The Jezabels comme : Nobody Nowhere, Hurt Me, Deep Wide Ocean, Dark Storm… on pourrait s’imaginer que la musique de The Jezabels est sombre et sinistre, mais quand on les écoute, aucun sentiment de tristesse ou dépression n’émerge. Votre musique semble plus optimiste que ses paroles.
Quand on écrit une chanson dans sa totalité, il faut qu’il y ait une sorte de balance, qu’il y ait certaines contradictions… Par exemple, si tu fais une musique super optimiste avec des paroles super joyeuses, les gens vont trouver ça too much, trop de joie dans un seul morceau. Je pense qu’il y a une forme d’espoir et de tristesse dans toutes ces chansons, une sorte de mélange parfait !
Vous avez annulé vos prochains concerts à cause de la santé d’un de vos membres…
Oui, notre pianiste. Healther s’est vue diagnostiquer un cancer alors qu’on écrivait notre deuxième album, à Londres. On pensait tout annuler mais elle voulait qu’on continue d’écrire et de vivre normalement. Et on a continué, le mieux qu’on a pu. Ce deuxième album était une sorte de thérapie pour nous tous.
Puis, le médecin a annoncé à Healther que le cancer avait progressé et devenait plus agressif, et qu’elle devait suivre un lourd traitement. Elle a dû rester à Sydney et on a dû annuler la tournée. Mais on reste optimiste, on est sûr qu’elle va s’en sortir, elle est entre de bonnes mains et puis elle est encore jeune et vit très sainement à côté de ça donc je suis sûre que tout va s’arranger. C’est triste qu’on ait dû tout annuler mais on est conscient d’avoir eu beaucoup de chance jusqu’ici, on est un groupe soudé depuis 10 ans maintenant, on a voyagé un peu partout dans le monde, c’est une vie de fous !
Même si ça devait s’arrêter pour nous, ça restera une aventure incroyable. Mais je promets que ça ne s’arrêtera pas ! C’est fou comme tout parait si simple quand on a la santé …
Quels sont vos derniers coups de coeur musicaux ?
J’aime beaucoup un groupe qui s’appelle : Fat White Family et aussi un autre groupe allemand qui s’appelle : Von De Show [après une petite recherche, nous nous sommes rendus à l’évidence : introuvable sur les internets]
Quels sont les artistes et groupes qui ont le plus inspiré la musique de The Jezabels ?
Il y avait quelques groupes qui nous inspiraient bien quand on a commencé : Arcade Fire, Interpol par exemple, The Killers, la musique indie américaine … Il y a aussi, The Cure, Depeche Mode, et pour moi, Royal Robinson…
Et puis bien sûr David Bowie. Vous savez, j’ai vraiment été dévastée quand j’ai appris sa disparition. Je ne le connaissais pas « personnellement » mais c’était un peu comme si quelqu’un de ma famille mourrait … On a tous pleuré le jour de sa mort. Ça va faire un peu cliché de le dire maintenant mais je l’ai toujours dit, c’était et c’est encore une influence massive pour nous tous.
Vous préférez plutôt le studio ou le live ?
Sans hésitation, le live ! Le studio c’est beaucoup de boulot, du travail très plaisant certes, mais quand même du travail. La récompense de ce travail c’est le live !
Avez-vous déjà utilisés des sons de la nature plutôt que vos instruments pour vos compositions ?
On n’a jamais enregistré de sons de la vie courante … En fait, ça paraît simple mais à chaque fois qu’on a essayé justement d’enregistrer des bruits ou des sons autour, il y avait constamment des interférences vu qu’il se passait toujours plein de choses en même temps autour de nous. Du coup ça ne donnait rien. Ça me plairait bien qu’on s’y mette un jour. Mais il faudrait pour cela qu’on développe des nouveaux sons qu’on ne pourrait pas obtenir avec les instruments avec lesquels on joue déjà !
Avez-vous des conseils pour tous les groupes qui débutent dans la musique ?
Écoutez beaucoup de musique mais n’essayez pas de créer en vous basant sur qu’il se passe en ce moment. Ça existe déjà, c’est trop tard ! Essayez d’avoir votre propre style, d’en développer un. Pratiquez beaucoup et faites du live, le plus que vous pouvez. Et surtout, foncez, ne lâchez rien, et ignorez les critiques !
Après avoir beaucoup tourné dans le monde, quel est votre pays préféré pour faire un concert ?
J’ai adoré partout où je suis allée. Je crois que je n’ai jamais été optimiste comme ça ! [rires]
Mais probablement l’Allemagne, l’Ecosse ou bien l’Irlande. C’est peut-être là-bas que notre musique connaît le plus gros succès. Pour être honnête j’adore jouer partout où l’on va, mais c’est peut-être en Allemagne qu’on a eu nos « meilleurs » publics.
Lesquels de vos morceaux ont le plus gros succès en live ?
Je ne sais pas … Peut-être Endless Summer ?
Je ne suis pas sûr parce que je ne suis pas vraiment tout ça (rires). Ils aiment bien aussi Hurt Me. Après, heureusement, ils aiment aussi les nouveaux albums ! C’est sympa quand les gens apprécient tes vieux morceaux mais c’est aussi cool quand ils sont réceptifs aux nouvelles propositions musicales.
En quoi le nouvel album de The Jezabels est différent des précédents, au-delà de l’aspect instrumental ?
Selon moi, c’est un album plus personnel, plus intime. Je me sens plus concernée par les questions d’égalité des genres. Être une femme est un vrai sujet, se sentir être une femme est plus important que durant les 2000 dernières années. C’est plus pertinent pour les gens.
Te considères-tu comme une personne engagée ?
C’est quelque chose d’assez amusant, mais de nos jours, ce n’est pas un vu comme super cool d’être engagé quand on est musicien. Mais je pense qu’à la fin, tout devient politique d’une manière ou d’une autre. Je souhaite l’égalité des sexes, l’égalité des genres …
C’est pas super original, c’est une idée qui ne date pas d’hier mais je pense qu’aujourd’hui, plus que jamais, on se doit d’être solidaire les uns avec les autres, que ce soit avec les femmes, les réfugiés, avec ceux qui ne partagent pas notre culture. Et je suppose qu’on devrait se préoccuper davantage des questions environnementales. On doit prendre nos responsabilités. On doit pouvoir se remettre en question et se demander « comment puis-je apporter ma contribution », car nous vivons dans une époque effrayante. On doit tous y mettre du sien.
La solution commencerait peut-être par cultiver davantage de paix entre nous tous et arrêter de massacrer la planète. Je pense qu’on n’a pas à être original dans nos engagements, ou dans nos intentions. C’est quelque chose que je crois avoir appris dans ma vie. Quand on est jeune et qu’on a tout ce qu’on veut, qu’on se croit immortel et que nos privilèges sont invisibles à nos yeux, c’est là qu’on pense le plus que les clichés « sont des clichés ». Mais avec l’expérience, après côtoyé la mort, subi de lourdes épreuves, on réalise que la plupart des clichés sont vrais. On doit prendre soin les uns des autres, être empathique…
J’ai entendu une histoire qui m’a bouleversé récemment. Une mère qui avait toujours été très dure et froide avec ses enfants demande à l’une de ses filles, alors qu’elle est allongée sur son lit de mort : « J’ai été dure avec vous, n’est-ce pas ? » Et elle regrettait d’avoir été comme ça pendant toutes ces années.
Ça m’a fait réfléchir, qu’est ce que je regretterai le jour où je serai sur mon lit de mort ?
On ne devrait pas attendre ce moment…
Non on devrait se questionner plus souvent. Parce que l’humanité est potentiellement sur son lit de mort. Il faut agir maintenant pour éviter d’avoir trop de regrets demain.
Beau slogan pour conclure ! Merci beaucoup Hayley
Thanks to you guys !