| Voir aussi : live-report du concert de Cage The Elephant, déchaînés au Trabendo le 22/02/16
Salut Brad, comment te sens-tu ? Pas trop difficile le décalage horaire ?
Je me suis endormi à quelque chose comme… 7h30 du matin. J’étais juste là à zapper de chaîne en chaîne comme un c*n. Je me sens mieux après beaucoup de thés.
Tu es sans aucun doute au courant que votre chanson Ain’t No Rest For Wicked a été utilisée dans le jeu vidéo épique Borderlands… Tu y as déjà joué ?
Oui bien sûr ! C’était le premier de cette série de jeux. On n’imaginait pas du tout que ça fonctionnerait comme ça. Ils [l’équipe du jeu] sont venus nous pitcher l’idée d’une vidéo pour l’intro du jeu et nous avons essayé… Ils ont aimé le morceau alors nous leur avons dit de l’utiliser. Et en réalité cela a été un véritable tremplin pour Cage The Elephant. Je suis très heureux qu’on l’ait fait.
À cette époque – en 2008 -, vous accompagniez The Pigeon Planes en tournée. Êtes-vous toujours en contact ? Pas énervés que vous les ayez complètement dépassés en popularité ?
Hahaha, je ne sais pas, je ne les ai pas vus depuis longtemps. Je suis tombé par hasard sur l’un de leurs guitaristes au festival Reading. C’est un super gars. On a traîné un peu avec lui.
Tes festivals préférés où vous avez joué (en Europe et aux États-Unis) ?
Rock en Seine est extraordinaire. C’est l’un de nos préférés en Europe c’est certain. J’aime aussi Reading à Leeds… Aux États-Unis, on adore Lollapalooza.
Tu as l’air d’aimer les énormes scènes avec beaucoup de spectateurs…
Pour les festivals, oui ! Mais du moment que nous jouons pour des personnes, nous sommes heureux. Nous avons joué devant des foules immenses. Mais dans de petites salles, c’est souvent plus intimiste et l’énergie est pourtant tout aussi forte pour des raisons différentes. J’aime alterner entre les deux.
Live ou studio ?
Même chose que pour la question précédente ! Pendant les concerts, tu es physiquement là, à créer du lien avec les gens. En studio, tu exprimes plus tes pensées et émotions par la musique. Et les deux sont excitants ensemble parce que 1. cela permet de soulager son esprit et 2. tu as l’occasion de te rapprocher des gens grâce à la musique.
Dan Auerbach des Black Keys a produit votre dernier album Tell Me I’m Pretty. Comment cela s’est-il fait ?
Nous avons fait quelque chose comme trois tournées avec The Black Keys ces 5 dernières années. On est simplement devenus amis, avec Dan et Pat [Patrick Carney, le batteur de The Black Keys]. Ce sont des personnes géniales, tous les deux.
Notre collaboration avec Dan est simplement venue de conversations autour de la musique que nous avons eues pendant la dernière tournée. Nous avons partagé avec Dan nos impressions et envies sur cet album que nous préparions, lui disant les idées que nous avions. Il nous a dit quelque chose comme : “vous devriez me jouer ces morceaux, j’adorerais les écouter”. Matt et moi lui avons laissé écouter des extraits que nous avions à ce moment-là et il a réagi de la meilleure des manières : “Je vais produire cet album”.
Dan Auerbach a-t-il mis beaucoup de ‘lui’ dans ce disque ?
Je pense qu’il met de lui dans tout ce qu’il fait. Il donne tout, c’est quelqu’un de vraiment passionné. Nous avions fait la majeure partie de la composition, nous avions déjà des morceaux complets. Je pense que Dan Auerbach a joué un rôle majeur dans le fait d’entendre les meilleures parties de ces morceaux et de retirer les parties non nécessaires qui couvraient les morceaux. Je crois que c’est une des choses qu’il fait le mieux.
Si tu regardes de plus près des morceaux intemporels, tu te rends compte que chaque partie est toujours faite intentionnellement. The Beatles – je ne nous compare pas avec les Beatles bien sûr -, sont le groupe ultime, ils étaient les meilleurs pour cela. Parfois, une petite ligne de guitare survient dans le morceau et ne revient jamais. C’est tellement évidemment intentionnel, cette ligne était faite pour ce moment, pour exprimer quelque chose en particulier. Chaque chose, chaque élément a sa place dans l’ensemble, ce n’est pas simplement empilé pour faire cette “bonne” chanson. Tout a un but en soi. Parce que, à la fin de la journée, la seule chose qui compte c’est la structure de la chanson, elle fait en sorte que la mélodie sonne bien. Tout le reste que tu inclus dans le morceau est fait pour le magnifier légèrement. Tu ne balances pas n’importe quoi dessus, sinon tu enterres le morceau.
Dan était excellent à retirer ce qui n’était pas nécessaire, ce qui aurait enterré d’autres meilleures parties de l’album.
Tell Me I’m Pretty sonne plus psychédélique et un peu moins “brut” que les autres albums de Cage The Elephant. C’était intentionnel ? Quelque chose que vous cherchiez à obtenir ?
Je ne pense pas que nous cherchions à faire un album psychédélique. Nous voulions juste expérimenter certains sons. Quand tu commences à mener des expériences sonores, que tu sors un peu de tes limites naturelles, hors de la norme, les gens perçoivent souvent cela comme psychédélique.
Nous avons gardé cela très organique, dans l’instant. Beaucoup des passages vocaux de Matt sont ce que les gens appelleraient scratch vocals, en seulement une seule prise. Ce n’était pas forcément la plus techniquement parfaite, mais la vibe était parfaite. C’est une autre chose que Dan peut vraiment entendre. Souvent nous disions pouvoir faire mieux, et Dan répondait “non, non, c’est cool comme ça.”
Est-ce que tu penses que la musique de Cage The Elephant correspond à un certain style, ou vous n’aimez pas vous fixer de limites ?
Je pense que c’est quelque chose contre lequel nous avons toujours lutté avec le groupe… Définir notre musique comme un certain… quoi que ce soit. Parce que je pense que les personnes ont besoin que la musique les reflète comme personnes. Nous avons tous de nombreuses différentes personnalités, différents reflets de nous-mêmes. Ta musique doit refléter cela. Quand tu regardes en arrière ce que tu étais 5 ans auparavant, tu trouves de nombreuses différences avec ton toi actuel. Parce que tu grandis, changes, apprends sans arrêt. Tu changes sur tous ces aspects. Tu es toujours essentiellement toi, tu n’es pas une personne entièrement différente, mais une meilleure version de toi-même.
En concert, certains de nos morceaux ont changé de la manière que nous avons changé. Ils ne sont pas dramatiquement différents, mais de nouvelles réponses, de nouvelles approches. Ils ont évolué.
As-tu des morceaux préférés sur Tell Me I’m Pretty ?
J’aime différents morceaux pour des raisons différentes. Notamment How Are You True, parce que je pense que les gens peuvent vraiment se sentir concernés par cette chanson. Je me sens totalement impliqué.
Également Punching Bags… J’aime tous les morceaux, on fait de la musique qu’on aime après tout ! Mais si j’avais juste un morceau à garder, ce serait sûrement Cry Baby.
Tu parlais des Beatles tout à l’heure. Est-ce que Lennon a été une grande source d’inspiration pour toi, en particulier en tant que guitariste rythmique ?
Lennon est mon songwriter préféré de tous les temps. Il “disait son esprit”. Paul McCartney est tout aussi bon, mais c’est différent. Pour moi, Paul McCartney était un grand conteur d’histoires, un peu comme Bob Dylan. Mais John Lennon… C’est comme s’il te parlait dans une conversation dans ses chansons. C’est pour cela que j’ai toujours accroché avec ses morceaux. S’il y avait un artiste qui lui ressemble un peu dans cette manière de parler à travers ses chansons, ce serait sans doute Kurt Cobain.
Quelqu’un entre pour apporter à Brad Shultz une nouvelle tasse de thé.
Tu adores Lennon et le thé. J’ai peut-être raté quelque chose. Tu es Anglais en fait ?
Oui haha, complètement !
[Revenant au sujet de la question précédente] Il y a d’autres artistes que j’aime vraiment, pour d’autres raisons. Je suis un énorme fan de Iggy Pop. Son nouveau groupe avec Josh Homme notamment est le plus cool des nouveaux groupes jamais créés ! Quand j’ai entendu ça, je me suis dit “wow”, cela devait vraiment arriver.
Je dis quelque chose à propos de Bowie…
Mec, cette année était juste une année de merde [a fucked up year], c’est fou. Lemmy, BB King, David Bowie, le leader de Earth Wind and Fire. C’est juste fou. Mais tu sais, à cette période de l’année, tu réalises que ces briscards deviennent vieux. C’est une partie de la vie. Ça craint mais c’est comme ça.
Quelqu’un entre nous dire que le temps pour cette géniale mais trop courte interview est terminée.
Ok, dernière question étrange et sortie de nulle part. Tu as des préférences entre Trump, Sanders, Clinton etc. pour la présidence américaine ?
Haha, on reste généralement hors de tout ce qui est politique. Mais c’est important oui. Je pense que Trump est une machine médiatique. Il serait mieux hors de tout ça, dans un show de télé-réalité, mais pas président. Je ne voterai pas pour lui, c’est tout ce que je dirai à ce sujet [rires].
Est-ce que tu as un album préféré de Bowie ?
Peut-être Ziggy Stardust ou Hunky Dory. Mon album préféré des Beatles change continuellement [rires].
Et en ce moment, c’est lequel ?
Abbey Road. J’ai commencé avec Abbey Road quand j’étais enfant. En grandissant, je me suis plus intéressé à Sgt. Pepper, puis Revolver, puis le White Album récemment. L’année dernière, le White Album était mon album préféré. Et puis je suis retourné à Abbey Road [rires]. Mais mon morceau préféré des Beatles a toujours été, sans interruption, Happiness Is A Warm Gun sur le White Album.
Brad a insisté pour nous faire écouter le morceau entier, pendant que nous descendions les escaliers de l’hôtel. Sans doute la meilleure manière de terminer cette interview…